Vers un nouvel art de bâtir - nos villes vont cesser d’être le bras armé d’une vieille doctrine totalitaire : celle du robot-ogre, normalisé et globalisé, dont la beauté de brute ne s’exprime qu’en formatant ses habitants et en violant les paysages. Elles vont se différencier peu à peu comme autant de concrétions naturelles où s’accumuleront ingénieusement les ressources locales, les cultures, les désirs et savoir-faire.

"VV" - un blog pour imaginer cette mutation, partager nos expériences, discuter, se rencontrer, proposer...

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18 sept. 2012

progrès industriel

dessin A.S.

Statistiquement, l'homme suit une évolution positive que l'on mesure dans l'innovation technique, l'inventivité artistique, la hausse de la scolarisation ou encore la baisse de la mortalité. Grâce à ce "progrès matériel", nous travaillons physiquement moins et nous vivons techniquement plus longtemps. Cependant, on doit se poser quelques questions plus en profondeur : nos outils et équipements nous aident-ils vraiment ? L'art est-il encore en relation avec la beauté ? L'école nous apprend-elle à mieux vivre en société ? Notre travail est-il agréable ? Qu'offrons-nous à l'avenir, à nos enfants ? Finalement, sommes-nous satisfaits ou, plus exactement, heureux ? Lentement, de questions en questions, l'affirmation du progrès s'étiole quand nous nous approchons les domaines insaisissables de la beauté, du bonheur, de l'accomplissement…

Notre bonheur augmente-t'il ? Difficile de répondre dans un domaine "métaphysique" ; on peut cependant noter certains symptômes, moments où le regard s’emplit de satisfaction, dans un bonheur quotidien marqué par le sourire et le chantonnement. Arrive alors le plus terrible des constats : les gens ne chantent plus, ne sifflent plus, ni sur leur travail, ni dans leur maison. Bientôt, on internera celui qui siffle encore. Mais les vieux se souviendront que le chant et le sifflotement étaient partout il y a encore une cinquantaine d’années, en cuisine, à la maison, chez le commerçant, à l’atelier, sur le chantier, dans la rue.  Pourquoi ? Tout simplement parce que nous nous contentons désormais d’écouter des sons fabriqués industriellement, la musique se trouvant enfermée dans des objets-médias et des évènements-concerts. Notre plaisir se limite à regarder celui d'individus fabriqués synthétiquement à échelle industrielle - l'industrie de la musique, de l'image. La chose insaisissable qu'était le chant a ainsi été transformée en biens commercialisables où le progrès industriel peut être mesuré : phonographe, radio, pick-up, magnétophone, walkman, MP3, 4, etc.

Le progrès industriel est inhumain car il détruit la beauté et le bonheur en les matérialisant ; anthropophage, aussi, car il demande toujours plus de ruse, de temps et d'énergie pour comprendre, fabriquer et se payer l'objet d'un plaisir individuel imitant le bonheur en société. Il en est de même avec la plupart des plaisirs conviviaux tournant autour de gestes simples et quotidiens : manger, travailler, parler, s'éduquer, marcher, aimer, et - bien entendu - construire et habiter. Distribués en tant que marchandises, les bonheurs individualistes et inanimés de la "consommation", de la "culture", des "loisirs" progressent en dévorant la vie humaine, faite d'action, de partage et de curiosité. Là doit se situer un autre progrès...

=> sujet [progrès] / message précédent : machine humaniste

1 commentaire:

  1. Je vais enfoncer une porte ouverte, mais il me semble que chacun a pu être frappé, malgré nos nombreuses béquilles technologiques, par les beautés de la nature. Même mes enfants ressentent se plaisir du premier rayon de soleil matinal qui nous réchauffe presque le dos, avec la brume qui se lève dans la plaine... Je pense que c'est encore et toujours en étant ému par la nature, que nous vient l'envie de la transmettre d'une façon ou d'une autre par la peinture, le cinéma, la musique.
    Évidemment le monde industriel travaille à la réduire elle aussi, mais sans y parvenir encore. Il me semble que nous avons encore nos chances...

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